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Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter
Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter
Entreprises
20
 
February
 
2023
8
 minutes

Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter

Pour la treizième interview de L’addition, Epsor a rencontré Xavier Savigny, DRH du groupe Saur.
Julien Niquet
Président

Lors de cet échange, il a été question de :

• La suppression de la période d’essai chez Saur, sa genèse, son implémentation et ses résultats ;

• L’actualité RH, notamment l’inflation et les solutions pour maintenir le pouvoir d’achat des salariés.  

Xavier Savigny, Saur

Xavier Savigny

DRH du groupe Saur

L’addition, Kézako ? 🙄

Un format d’interview au cours duquel Epsor part à la rencontre des Compensation& Benefits (C&B), des DRH et des DAF parmi les plus influent(e)s dans leur domaine. L’objectif : comprendre la profession de ces derniers, en savoir plus sur leur vision de la rémunération et des avantages sociaux et connaître leurs bonnes pratiques.

À travers ces entretiens, nous nous intéresserons à la façon dont chacun(e) incarne ses fonctions, parce que leur métier ne se limite pas seulement à l’addition RH + Finance… toutes et tous ont un ingrédient secret pour ravir leurs collaborateurs et renforcer la marque employeur de leur entreprise !

Pour ce treizième rendez-vous, Epsor a rencontré Xavier Savigny, Directeur des Ressources Humaines, de l’Organisation et de la Transformation au sein du groupe Saur, spécialiste de la distribution de l’eau. L’occasion de revenir sur la suppression de la période d’essai chez Saur, une mesure destinée à faciliter le recrutement, récompensée par le Prix de l’innovation RH 2021.

Le texte qui suit est une libre transposition de l’échange susmentionné. Pour découvrir cet entretien dans son intégralité, nous vous invitons à en visionner le replay.

 

Xavier Savigny, pouvez-vous vous présenter et présenter votre entreprise ?

Je suis DRH du groupe Saur que j’ai rejoint en 2020, au cœur de la crise Covid.

Le groupe Saur est un acteur spécialisé dans la production et la distribution d’eau potable pour le compte des agglomérations. Grâce à nos 12 000 collaborateurs, nous desservons environ 20 millions d’usagers dans 20 pays différents.

Nous sommes une entreprise de proximité. Nous possédons un maillage de plus de 4 000 usines de production et de traitement des eaux usées, implantées au cœur des territoires. Nos équipes travaillent sur ces sites, mais aussi en mobilité puisque nous gérons plus de 250 000 km de canalisations.

 

En 2021, le groupe Saur a supprimé la période d’essai. Pourquoi ?

La suppression de la période d’essai pour les  groupe Saur est une mesure qui trouve son origine dans le contexte de la pandémie. À cette époque, nous avons en effet fait le choix de maintenir notre programme d’apprentissage afin de nous assurer que, malgré les circonstances, la nouvelle génération puisse entrer dans l’entreprise. 

Cependant, en ces temps tourmentés, nous avons constaté qu’étant en période d’essai, nos nouvelles recrues rencontraient des difficultés pour se loger.

Face à cette situation qui constituait un frein aux recrutements nous avons songé à supprimer la période d’essai afin de permettre à nos jeunes salariés de louer plus facilement.

 

Comment avez-vous procédé pour mettre en place cette mesure ?

Comme la suppression de la période d’essai était une mesure encore inédite en France, notre premier réflexe a été de vérifier qu’aucune disposition du Code du Travail ne s’y opposait. 

J’ai bien évidemment fait part de cette idée à notre CEO qui a été très réceptif et nous a encouragés à explorer cette idée. Dès lors, nous avons imaginé effectuer un test de quelques mois à l’issue duquel nous dresserions un bilan et choisirions de poursuivre le déploiement ou d’y mettre fin. L’objectif était de voir si ce dispositif fonctionnait, tout en nous laissant la possibilité de revenir en arrière.

Cela s’est fait à un moment où, parallèlement, nous étions en train de retravailler l’ensemble du process de recrutement, car nous avions de gros besoins en la matière. Dans ce contexte, la suppression de la période d’essai a été la cerise sur le gâteau.

 

Comment avez-vous convaincu votre CoDir d’abandonner la période d’essai ?

Notre CEO nous a apporté très tôt son soutien, mais il nous restait à obtenir l’aval des autres membres du Comité de direction. Dans cette perspective, la conviction et l’intervention de notre directeur général ont été déterminantes. Mais nous ne nous en sommes pas tenus là.

En premier lieu, nous avons présenté des données, notamment en vue de démontrer la faible occurrence des ruptures en période d’essai chez Saur.

Par ailleurs, l’argument du test, et donc de l’éventuelle réversibilité de la mesure, prise sur décision unilatérale de l’employeur, nous a permis de rassurer nos dirigeants.

Enfin, nous avons souligné le fait que cette innovation pourrait constituer un avantage compétitif sur un marché très mouvant, sujet à des problématiques de recrutement et de fidélisation des talents.

À nos yeux, la suppression de la période d’essai représente en effet un acte fort de la part de l’entreprise, susceptible d’instaurer une relation de confiance dès le départ et donc de pérenniser la collaboration (17 ou 18 ans en moyenne chez Saur).

 

Comment vous êtes-vous assuré de l’efficience de cette mesure ?

La suppression de la période d’essai a été déployée en parallèle d’une transformation de notre process de recrutement.

Dans un premier temps, nous avons changé la relation entre recruteurs et managers en invitant ces derniers à exprimer leurs besoins et leurs enjeux de façon très détaillée et anticipée afin de permettre à l’équipe du Talent Acquisition de sélectionner les profils ad hoc.

Ensuite, nous avons rassuré les encadrants en leur garantissant le soutien de la RH et en cas de recrutement non probant.

Troisième point, nous avons observé les données obtenues à l’issue de la phase de test de la suppression de la période d’essai. Résultat : le nombre de ruptures et de départs en période d’essai (déjà peu nombreux auparavant) a été divisé par trois.

Pour terminer, nous avons écouté les retours des nouvelles recrues, lesquels étaient extrêmement positifs. Les salariés apprécient beaucoup la confiance qui leur est accordée, dès leur arrivée, par l’entreprise. Le mot clé pour nous a été la confiance de part et d’autre.

Face au succès rencontré par la suppression de la période d’essai, nous avons finalement décidé de généraliser cette mesure à tous nos collaborateurs, et cela au bout de 3 ou 4 mois d’expérimentation seulement.

 

Certains salariés ont-ils refusé de ne pas avoir de période d’essai ?

Au cours de la phase de test, seuls deux candidats ont demandé à bénéficier malgré tout d’une période d’essai. Dans cette situation, nous avons préféré ne pas donner suite. Un recrutement nécessite en effet une forme de prise de risque, d’engagement et de confiance mutuelle.

Au sein du groupe Saur, nous tenons à recruter sur des bases authentiques afin de ne pas créer de déception et de frustration de la part du candidat et de l’entreprise. Nous présentons la réalité sans fard : nos nombreux points forts, mais aussi ce qui fonctionne moins bien. En contrepartie, nous attendons la même transparence de la part des candidats.

L’idée est en effet de se découvrir, de voir si la collaboration pourrait être fructueuse, puis de s’engager de concert. En cas de doute du côté de l’entreprise ou de celui du candidat, nous préférons donc renoncer à l’embauche.

 

La suppression de la période d’essai concerne-t-elle tous les salariés ?

Oui, la suppression de la période d’essai concerne l’ensemble des salariés du groupe, qu’ils soient ouvriers, techniciens, cadres ou cadres dirigeants mais également pour tous les types de contrats(CDI, CDD, contrat d’alternance …).

Selon moi, cette généralisation du dispositif est une très bonne chose. Elle correspond en effet à une forme d’équité. Avant, seuls certains profils, principalement des cadres et experts de haut niveau, se voyaient occasionnellement dispensés de période d’essai. Aujourd’hui, la règle est la même pour tout le monde. Il n’est plus question de parcours ou de pouvoir de négociation.

Par ailleurs, je perçois cette suppression de la période d’essai comme un témoignage de respect à l’égard des candidats qui postulent pour rejoindre l’entreprise. Chaque recrutement donne lieu à une réflexion qui est beaucoup plus forte qu’auparavant.

 

Comment avez-vous embarqué les managers dans ce changement ?

La suppression de la période d’essai correspond à une responsabilisation beaucoup plus forte des managers. Elle impose en effet de renforcer le recrutement afin de déterminer le type de profil que nous souhaitons embaucher très en amont pour garantir l’adéquation entre l’entreprise et le candidat. 

Ce qui nous a permis de sensibiliser les encadrants à leur nouveau rôle est que nous avons redéployé l’ensemble de notre process de recrutement. L’objectif étant de définir très précisément les profils que les managers veulent recruter. Nous avons beaucoup travaillé sur ce point et nous avons simplifié tout le reste.

Concrètement, nous avons automatisé une partie des tâches incombant aux encadrants, les demandes de recrutement par exemple. Parallèlement, nous avons fait en sorte que, lors des entretiens, les managers se focalisent sur les compétences techniques des candidats et sur leur capacité à s’intégrer dans l’entreprise et dans leur équipe.

Ce filtre est essentiel, car le travail du recruteur est de s’assurer qu’il y a une concordance culturelle entre le talent et l’organisation, et qu’il correspond aux attentes du groupe, notamment à ses besoins techniques. Cependant, un talent acquisition n’a pas toutes les cartes en main pour juger l’aspect technique. Pour éviter les erreurs, il est par conséquent nécessaire de croiser les regards : celui du recruteur et celui du manager.

 

Ce dispositif s’inscrit donc dans le cadre d’une refonte de la fonction RH ? 

Effectivement. Lorsque j’ai rejoint le groupe Saur en 2020, nous avions des RRH généralistes répartis sur l’ensemble du territoire. Ces derniers faisaient à peu près tout : recrutement, rédaction des contrats, administratif, etc.

L’inconvénient de ce mode de fonctionnement était que les RH locaux ne pouvaient pas se concentrer pleinement sur leur mission de recrutement, car ils étaient très sollicités.

De plus, je suis persuadé qu’il y a des métiers de spécialisation au sein de la fonction Ressources Humaines, avec chacun une véritable expertise. Or, recruter est un savoir-faire à part entière. Nous sommes donc partis de la conviction que si nous avions beaucoup d’embauches à faire, il fallait que nous ayons une spécialisation de nos recruteurs.

Conséquence, désormais, nos recruteurs sont en région tout en étant pilotés centralement, mais surtout, ils ne font plus que du recrutement. C’est un changement majeur par rapport à notre situation antérieure.

L’avantage de ce nouveau système est que nos RRH ont beaucoup plus de temps pour échanger avec les salariés et les managers.Le rôle du RRH est donc passé de généraliste à ambassadeur, facilitateur et conseiller auprès des collaborateurs.

 

La suppression de la période d’essai a-t-elle renforcé votre attractivité ? 

Oui, notamment sur la fin de l’année 2021, car nous avons remporté le Prix de l’innovation RH 2021 grâce à cette mesure. Cela a fait un peu de buzz, y compris sur les réseaux sociaux, et cet effet médiatique a généré un flot de candidatures accru.

Par ailleurs, sur un marché concurrentiel comme le nôtre, avec de très forts besoins en recrutement, le fait de ne pas avoir de période d’essai nous aide parfois à faire la différence et à attirer des talents qui auraient peut-être hésité entre nous et un autre employeur.

 

Quelle a été la réaction des organisations syndicales face à cette mesure ?

Nous avons des organisations syndicales formidables, qui sont très attachées à l’entreprise et à son développement.

Au départ, leurs membres ont exprimé des opinions très partagées à l’égard de la suppression de la période d’essai, et cela indépendamment de leur appartenance à une OS spécifique. Les managers ont par exemple eu une première réaction liée à leur fonction.

Ensuite, un consensus s’est formé autour de l’idée que cette mesure était une bonne chose. Chacun a en effet pu constater les bénéfices de l’abandon de la période d’essai, notamment le fait que nous soyons plus attractifs et que nous puissions embaucher plus facilement et faire entrer dans l’entreprise des personnes destinées à y rester durablement.

 

L’absence de période d’essai implique de limiter les risques en amont du recrutement. Ce faisant, ne nuit-elle pas à la diversité des profils ?

Personnellement, je n’ai pas constaté de baisse de la diversité ou de mise à l’écart des profils atypiques à la suite de la suppression de la période d’essai. 

Sur l’ensemble de nos managers il est possible que certains aient eu tendance à privilégier des profils similaires à ceux déjà en poste. Mais n’était-ce pas le cas auparavant ?

En réalité, la diversité est toujours un enjeu du recrutement et c’est le rôle des équipes de s’assurer qu’elle est respectée au sein de l’entreprise.

Chez Saur, les candidats sont d’abord sélectionnés par les recruteurs avant d’être présentés aux managers. De cette façon, nous pouvons influer sur la diversité des profils embauchés. C’est l’un des apports de notre nouveau process de recrutement.

 

La suppression de la période d’essai a-t-elle tout de même des inconvénients ?

Honnêtement, je ne vois pas d’inconvénient à l’abandon de la période d’essai. Finalement, la seule limite que nous avons rencontrée est l’appréhension que nous avons eue, en tant que RH, managers et dirigeants, avant de mettre en place cette mesure inconnue.

Cette innovation RH a-t-elle été reprise par d’autres entreprises ?

À ma grande surprise, très peu. Je crois qu’à ce jour seules deux entreprises, que je ne peux pas citer ici, ont également supprimé la période d’essai pour leurs nouvelles recrues.

 

Prenons du recul. Quelle est votre lecture de l’actualité RH ?  

L’actualité RH est marquée par l’inflation, mais aussi par un risque de récession qui se profile dans certains pays et par la crise énergétique qui met certaines entreprises en grande difficulté.

Dans ce contexte économique compliqué, les DRH doivent trouver un équilibre. Jusqu’à présent, beaucoup de groupes ont pu faire passer des augmentations de prix auprès de leurs clients. Mais, demain, cela ne sera peut-être plus possible…

Il faut donc chercher des solutions pour réussir un atterrissage en douceur. C’est un enjeu majeur pour toutes les entreprises, et pas seulement en France.

 

Face à l’inflation, quelles mesures le groupe Saur a-t-il mises en place en 2022 ?

Nous avons mis en place deux mesures pour aider nos salariés à faire face à l’inflation et préserver leur niveau de vie. 

En premier lieu, dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, nous avons réalisé une augmentation des salaires de 4 % en début d’année 2022. Cette politique est assez offensive et plutôt significative par rapport à ce que proposent les autres acteurs de notre secteur.  

Ensuite, nous avons accordé une prime PEPA, ou prime Macron, à nos salariés.

Désormais, alors que l’inflation s’inscrit dans la durée et atteint des niveaux importants, nous cherchons d’autres mesures à mettre en place afin d’aider nos collaborateurs à maintenir leur pouvoir d’achat. Ceci est au cœur de nos échanges avec les organisations syndicales.

 

Dans ce contexte tendu, avez-vous prévu des augmentations collectives ?

Oui. Justement, sur l’augmentation salariale de 4 %que j’évoquais plus tôt, 2 % sont réservés aux augmentations collectives et 2 % aux augmentations individuelles. L’idée est de prévoir un socle de base, tout en ménageant une marge pour les ajustements liés à la performance.

Nous n’avions pas fait d’augmentation collective depuis très longtemps. Pour moi, c’est quelque chose d’important qui découle de nos discussions avec nos partenaires sociaux.

Aujourd’hui, pour les entreprises, le sujet n’est pas tant de savoir si elles vont aider leurs salariés à maintenir leur pouvoir d’achat, mais comment faire. Or, dans un contexte de récession, je ne suis pas sûr que l’augmentation du salaire fixe soit la mesure qui sera privilégiée.

À rebours, l’accroissement du nombre de personnes qui touchent un salaire variable, y compris très “bas” dans l’organisation, est une piste que nous allons explorer. Cela peut être un axe de réflexion important pour beaucoup d’employeurs. 

En effet, avec ce dispositif, si la société fait de la performance cette dernière est redistribuée et, dans le cas inverse, l’entreprise survit en évitant une inflation des coûts décorrélée de ses résultats.

 

Avez-vous expérimenté la prime de 2000 euros à l’embauche ?

Nous avons mis en place une prime de bienvenue ponctuelle destinée aux salariés qui nous rejoignent sur des postes en CDI dans nos métiers travaux.

La raison : nous avons connu une forte croissance de notre activité et de beaux succès commerciaux, de sorte que nos besoins en recrutement dans le domaine des travaux ont atteint un pic.

 

Avez-vous mis en place des dispositifs pour valoriser votre politique salariale ?

La valorisation des mesures prises dans le cadre de la politique salariale et de leurs bénéfices concrets pour les collaborateurs est très importante. Dans cette perspective, nous avons fourni à chacun de nos salariés un bilan social individuel (BSI) récapitulant l’ensemble des salaires et avantages sociaux versés par l’entreprise au cours de cette année. Cette démarche a été très appréciée par les collaborateurs, car souvent ces derniers ne réalisent pas tout ce dont ils bénéficient.

Par ailleurs, nous avons complètement revu notre accord de participation et d’intéressement. La participation étant généralement un sujet très flou pour les salariés, nous avons fixé une formule unique pour le calcul de la participation et de l’intéressement, ce qui nous permet de mieux communiquer.

 

Pour finir, quel est selon vous l’ingrédient secret à ajouter à l’addition C&B = RH + Finance+… ?

Ressources Humaines + Finance +… Communication !

Je pense en effet que la communication est essentielle lorsqu’on fait du Comp & Ben, et cela plus encore dans un contexte incertain et compliqué comme celui que nous connaissons en ce moment.

L'addition, une communauté Epsor

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Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter
Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter

Saur : supprimer la période d’essai pour mieux recruter

Sommaire

1. L’épargne salariale et retraite, kézako ?
  • L’épargne salariale, comment ça marche ?
  • L’intéressement en bref
  • Intéressement & start-ups/scale-ups, le combo parfait
  • L’intéressement en chiffres
2. Une solution gagnant-gagnant !
  • Des économies pour tous
  • L’épargne salariale, un outil 360°
3. Mise en place de l’intéressement : tuto !
  • 7 choses à savoir sur l’accord d’intéressement
  • Les 3 grandes étapes à suivre
  • Les règles d’or pour un accord réussi
  • Use case #1: start-up de 200 collaborateurs
  • Use case #2 : start-up de 45 collaborateurs
4. 5 conseils pour bien choisir son prestataire
  • Le maître mot : la pédagogie
  • Une épargne qui ressemble à vos salariés !
  • L’importance d’une gamme d’investissement diversifiée • RSE : priorité aux valeurs de vos collaborateurs
  • Frais transparents & compétitifs
5. (Bonus) Soigner les finitions !
  • Les démarches administratives, on s’en occupe !
  • Communiquez, communiquez... et communiquez !
Nous gérons l’épargne de leurs salariés

Lors de cet échange, il a été question de :

• La suppression de la période d’essai chez Saur, sa genèse, son implémentation et ses résultats ;

• L’actualité RH, notamment l’inflation et les solutions pour maintenir le pouvoir d’achat des salariés.  

Xavier Savigny, Saur

Xavier Savigny

DRH du groupe Saur

L’addition, Kézako ? 🙄

Un format d’interview au cours duquel Epsor part à la rencontre des Compensation& Benefits (C&B), des DRH et des DAF parmi les plus influent(e)s dans leur domaine. L’objectif : comprendre la profession de ces derniers, en savoir plus sur leur vision de la rémunération et des avantages sociaux et connaître leurs bonnes pratiques.

À travers ces entretiens, nous nous intéresserons à la façon dont chacun(e) incarne ses fonctions, parce que leur métier ne se limite pas seulement à l’addition RH + Finance… toutes et tous ont un ingrédient secret pour ravir leurs collaborateurs et renforcer la marque employeur de leur entreprise !

Pour ce treizième rendez-vous, Epsor a rencontré Xavier Savigny, Directeur des Ressources Humaines, de l’Organisation et de la Transformation au sein du groupe Saur, spécialiste de la distribution de l’eau. L’occasion de revenir sur la suppression de la période d’essai chez Saur, une mesure destinée à faciliter le recrutement, récompensée par le Prix de l’innovation RH 2021.

Le texte qui suit est une libre transposition de l’échange susmentionné. Pour découvrir cet entretien dans son intégralité, nous vous invitons à en visionner le replay.

 

Xavier Savigny, pouvez-vous vous présenter et présenter votre entreprise ?

Je suis DRH du groupe Saur que j’ai rejoint en 2020, au cœur de la crise Covid.

Le groupe Saur est un acteur spécialisé dans la production et la distribution d’eau potable pour le compte des agglomérations. Grâce à nos 12 000 collaborateurs, nous desservons environ 20 millions d’usagers dans 20 pays différents.

Nous sommes une entreprise de proximité. Nous possédons un maillage de plus de 4 000 usines de production et de traitement des eaux usées, implantées au cœur des territoires. Nos équipes travaillent sur ces sites, mais aussi en mobilité puisque nous gérons plus de 250 000 km de canalisations.

 

En 2021, le groupe Saur a supprimé la période d’essai. Pourquoi ?

La suppression de la période d’essai pour les  groupe Saur est une mesure qui trouve son origine dans le contexte de la pandémie. À cette époque, nous avons en effet fait le choix de maintenir notre programme d’apprentissage afin de nous assurer que, malgré les circonstances, la nouvelle génération puisse entrer dans l’entreprise. 

Cependant, en ces temps tourmentés, nous avons constaté qu’étant en période d’essai, nos nouvelles recrues rencontraient des difficultés pour se loger.

Face à cette situation qui constituait un frein aux recrutements nous avons songé à supprimer la période d’essai afin de permettre à nos jeunes salariés de louer plus facilement.

 

Comment avez-vous procédé pour mettre en place cette mesure ?

Comme la suppression de la période d’essai était une mesure encore inédite en France, notre premier réflexe a été de vérifier qu’aucune disposition du Code du Travail ne s’y opposait. 

J’ai bien évidemment fait part de cette idée à notre CEO qui a été très réceptif et nous a encouragés à explorer cette idée. Dès lors, nous avons imaginé effectuer un test de quelques mois à l’issue duquel nous dresserions un bilan et choisirions de poursuivre le déploiement ou d’y mettre fin. L’objectif était de voir si ce dispositif fonctionnait, tout en nous laissant la possibilité de revenir en arrière.

Cela s’est fait à un moment où, parallèlement, nous étions en train de retravailler l’ensemble du process de recrutement, car nous avions de gros besoins en la matière. Dans ce contexte, la suppression de la période d’essai a été la cerise sur le gâteau.

 

Comment avez-vous convaincu votre CoDir d’abandonner la période d’essai ?

Notre CEO nous a apporté très tôt son soutien, mais il nous restait à obtenir l’aval des autres membres du Comité de direction. Dans cette perspective, la conviction et l’intervention de notre directeur général ont été déterminantes. Mais nous ne nous en sommes pas tenus là.

En premier lieu, nous avons présenté des données, notamment en vue de démontrer la faible occurrence des ruptures en période d’essai chez Saur.

Par ailleurs, l’argument du test, et donc de l’éventuelle réversibilité de la mesure, prise sur décision unilatérale de l’employeur, nous a permis de rassurer nos dirigeants.

Enfin, nous avons souligné le fait que cette innovation pourrait constituer un avantage compétitif sur un marché très mouvant, sujet à des problématiques de recrutement et de fidélisation des talents.

À nos yeux, la suppression de la période d’essai représente en effet un acte fort de la part de l’entreprise, susceptible d’instaurer une relation de confiance dès le départ et donc de pérenniser la collaboration (17 ou 18 ans en moyenne chez Saur).

 

Comment vous êtes-vous assuré de l’efficience de cette mesure ?

La suppression de la période d’essai a été déployée en parallèle d’une transformation de notre process de recrutement.

Dans un premier temps, nous avons changé la relation entre recruteurs et managers en invitant ces derniers à exprimer leurs besoins et leurs enjeux de façon très détaillée et anticipée afin de permettre à l’équipe du Talent Acquisition de sélectionner les profils ad hoc.

Ensuite, nous avons rassuré les encadrants en leur garantissant le soutien de la RH et en cas de recrutement non probant.

Troisième point, nous avons observé les données obtenues à l’issue de la phase de test de la suppression de la période d’essai. Résultat : le nombre de ruptures et de départs en période d’essai (déjà peu nombreux auparavant) a été divisé par trois.

Pour terminer, nous avons écouté les retours des nouvelles recrues, lesquels étaient extrêmement positifs. Les salariés apprécient beaucoup la confiance qui leur est accordée, dès leur arrivée, par l’entreprise. Le mot clé pour nous a été la confiance de part et d’autre.

Face au succès rencontré par la suppression de la période d’essai, nous avons finalement décidé de généraliser cette mesure à tous nos collaborateurs, et cela au bout de 3 ou 4 mois d’expérimentation seulement.

 

Certains salariés ont-ils refusé de ne pas avoir de période d’essai ?

Au cours de la phase de test, seuls deux candidats ont demandé à bénéficier malgré tout d’une période d’essai. Dans cette situation, nous avons préféré ne pas donner suite. Un recrutement nécessite en effet une forme de prise de risque, d’engagement et de confiance mutuelle.

Au sein du groupe Saur, nous tenons à recruter sur des bases authentiques afin de ne pas créer de déception et de frustration de la part du candidat et de l’entreprise. Nous présentons la réalité sans fard : nos nombreux points forts, mais aussi ce qui fonctionne moins bien. En contrepartie, nous attendons la même transparence de la part des candidats.

L’idée est en effet de se découvrir, de voir si la collaboration pourrait être fructueuse, puis de s’engager de concert. En cas de doute du côté de l’entreprise ou de celui du candidat, nous préférons donc renoncer à l’embauche.

 

La suppression de la période d’essai concerne-t-elle tous les salariés ?

Oui, la suppression de la période d’essai concerne l’ensemble des salariés du groupe, qu’ils soient ouvriers, techniciens, cadres ou cadres dirigeants mais également pour tous les types de contrats(CDI, CDD, contrat d’alternance …).

Selon moi, cette généralisation du dispositif est une très bonne chose. Elle correspond en effet à une forme d’équité. Avant, seuls certains profils, principalement des cadres et experts de haut niveau, se voyaient occasionnellement dispensés de période d’essai. Aujourd’hui, la règle est la même pour tout le monde. Il n’est plus question de parcours ou de pouvoir de négociation.

Par ailleurs, je perçois cette suppression de la période d’essai comme un témoignage de respect à l’égard des candidats qui postulent pour rejoindre l’entreprise. Chaque recrutement donne lieu à une réflexion qui est beaucoup plus forte qu’auparavant.

 

Comment avez-vous embarqué les managers dans ce changement ?

La suppression de la période d’essai correspond à une responsabilisation beaucoup plus forte des managers. Elle impose en effet de renforcer le recrutement afin de déterminer le type de profil que nous souhaitons embaucher très en amont pour garantir l’adéquation entre l’entreprise et le candidat. 

Ce qui nous a permis de sensibiliser les encadrants à leur nouveau rôle est que nous avons redéployé l’ensemble de notre process de recrutement. L’objectif étant de définir très précisément les profils que les managers veulent recruter. Nous avons beaucoup travaillé sur ce point et nous avons simplifié tout le reste.

Concrètement, nous avons automatisé une partie des tâches incombant aux encadrants, les demandes de recrutement par exemple. Parallèlement, nous avons fait en sorte que, lors des entretiens, les managers se focalisent sur les compétences techniques des candidats et sur leur capacité à s’intégrer dans l’entreprise et dans leur équipe.

Ce filtre est essentiel, car le travail du recruteur est de s’assurer qu’il y a une concordance culturelle entre le talent et l’organisation, et qu’il correspond aux attentes du groupe, notamment à ses besoins techniques. Cependant, un talent acquisition n’a pas toutes les cartes en main pour juger l’aspect technique. Pour éviter les erreurs, il est par conséquent nécessaire de croiser les regards : celui du recruteur et celui du manager.

 

Ce dispositif s’inscrit donc dans le cadre d’une refonte de la fonction RH ? 

Effectivement. Lorsque j’ai rejoint le groupe Saur en 2020, nous avions des RRH généralistes répartis sur l’ensemble du territoire. Ces derniers faisaient à peu près tout : recrutement, rédaction des contrats, administratif, etc.

L’inconvénient de ce mode de fonctionnement était que les RH locaux ne pouvaient pas se concentrer pleinement sur leur mission de recrutement, car ils étaient très sollicités.

De plus, je suis persuadé qu’il y a des métiers de spécialisation au sein de la fonction Ressources Humaines, avec chacun une véritable expertise. Or, recruter est un savoir-faire à part entière. Nous sommes donc partis de la conviction que si nous avions beaucoup d’embauches à faire, il fallait que nous ayons une spécialisation de nos recruteurs.

Conséquence, désormais, nos recruteurs sont en région tout en étant pilotés centralement, mais surtout, ils ne font plus que du recrutement. C’est un changement majeur par rapport à notre situation antérieure.

L’avantage de ce nouveau système est que nos RRH ont beaucoup plus de temps pour échanger avec les salariés et les managers.Le rôle du RRH est donc passé de généraliste à ambassadeur, facilitateur et conseiller auprès des collaborateurs.

 

La suppression de la période d’essai a-t-elle renforcé votre attractivité ? 

Oui, notamment sur la fin de l’année 2021, car nous avons remporté le Prix de l’innovation RH 2021 grâce à cette mesure. Cela a fait un peu de buzz, y compris sur les réseaux sociaux, et cet effet médiatique a généré un flot de candidatures accru.

Par ailleurs, sur un marché concurrentiel comme le nôtre, avec de très forts besoins en recrutement, le fait de ne pas avoir de période d’essai nous aide parfois à faire la différence et à attirer des talents qui auraient peut-être hésité entre nous et un autre employeur.

 

Quelle a été la réaction des organisations syndicales face à cette mesure ?

Nous avons des organisations syndicales formidables, qui sont très attachées à l’entreprise et à son développement.

Au départ, leurs membres ont exprimé des opinions très partagées à l’égard de la suppression de la période d’essai, et cela indépendamment de leur appartenance à une OS spécifique. Les managers ont par exemple eu une première réaction liée à leur fonction.

Ensuite, un consensus s’est formé autour de l’idée que cette mesure était une bonne chose. Chacun a en effet pu constater les bénéfices de l’abandon de la période d’essai, notamment le fait que nous soyons plus attractifs et que nous puissions embaucher plus facilement et faire entrer dans l’entreprise des personnes destinées à y rester durablement.

 

L’absence de période d’essai implique de limiter les risques en amont du recrutement. Ce faisant, ne nuit-elle pas à la diversité des profils ?

Personnellement, je n’ai pas constaté de baisse de la diversité ou de mise à l’écart des profils atypiques à la suite de la suppression de la période d’essai. 

Sur l’ensemble de nos managers il est possible que certains aient eu tendance à privilégier des profils similaires à ceux déjà en poste. Mais n’était-ce pas le cas auparavant ?

En réalité, la diversité est toujours un enjeu du recrutement et c’est le rôle des équipes de s’assurer qu’elle est respectée au sein de l’entreprise.

Chez Saur, les candidats sont d’abord sélectionnés par les recruteurs avant d’être présentés aux managers. De cette façon, nous pouvons influer sur la diversité des profils embauchés. C’est l’un des apports de notre nouveau process de recrutement.

 

La suppression de la période d’essai a-t-elle tout de même des inconvénients ?

Honnêtement, je ne vois pas d’inconvénient à l’abandon de la période d’essai. Finalement, la seule limite que nous avons rencontrée est l’appréhension que nous avons eue, en tant que RH, managers et dirigeants, avant de mettre en place cette mesure inconnue.

Cette innovation RH a-t-elle été reprise par d’autres entreprises ?

À ma grande surprise, très peu. Je crois qu’à ce jour seules deux entreprises, que je ne peux pas citer ici, ont également supprimé la période d’essai pour leurs nouvelles recrues.

 

Prenons du recul. Quelle est votre lecture de l’actualité RH ?  

L’actualité RH est marquée par l’inflation, mais aussi par un risque de récession qui se profile dans certains pays et par la crise énergétique qui met certaines entreprises en grande difficulté.

Dans ce contexte économique compliqué, les DRH doivent trouver un équilibre. Jusqu’à présent, beaucoup de groupes ont pu faire passer des augmentations de prix auprès de leurs clients. Mais, demain, cela ne sera peut-être plus possible…

Il faut donc chercher des solutions pour réussir un atterrissage en douceur. C’est un enjeu majeur pour toutes les entreprises, et pas seulement en France.

 

Face à l’inflation, quelles mesures le groupe Saur a-t-il mises en place en 2022 ?

Nous avons mis en place deux mesures pour aider nos salariés à faire face à l’inflation et préserver leur niveau de vie. 

En premier lieu, dans le cadre des négociations annuelles obligatoires, nous avons réalisé une augmentation des salaires de 4 % en début d’année 2022. Cette politique est assez offensive et plutôt significative par rapport à ce que proposent les autres acteurs de notre secteur.  

Ensuite, nous avons accordé une prime PEPA, ou prime Macron, à nos salariés.

Désormais, alors que l’inflation s’inscrit dans la durée et atteint des niveaux importants, nous cherchons d’autres mesures à mettre en place afin d’aider nos collaborateurs à maintenir leur pouvoir d’achat. Ceci est au cœur de nos échanges avec les organisations syndicales.

 

Dans ce contexte tendu, avez-vous prévu des augmentations collectives ?

Oui. Justement, sur l’augmentation salariale de 4 %que j’évoquais plus tôt, 2 % sont réservés aux augmentations collectives et 2 % aux augmentations individuelles. L’idée est de prévoir un socle de base, tout en ménageant une marge pour les ajustements liés à la performance.

Nous n’avions pas fait d’augmentation collective depuis très longtemps. Pour moi, c’est quelque chose d’important qui découle de nos discussions avec nos partenaires sociaux.

Aujourd’hui, pour les entreprises, le sujet n’est pas tant de savoir si elles vont aider leurs salariés à maintenir leur pouvoir d’achat, mais comment faire. Or, dans un contexte de récession, je ne suis pas sûr que l’augmentation du salaire fixe soit la mesure qui sera privilégiée.

À rebours, l’accroissement du nombre de personnes qui touchent un salaire variable, y compris très “bas” dans l’organisation, est une piste que nous allons explorer. Cela peut être un axe de réflexion important pour beaucoup d’employeurs. 

En effet, avec ce dispositif, si la société fait de la performance cette dernière est redistribuée et, dans le cas inverse, l’entreprise survit en évitant une inflation des coûts décorrélée de ses résultats.

 

Avez-vous expérimenté la prime de 2000 euros à l’embauche ?

Nous avons mis en place une prime de bienvenue ponctuelle destinée aux salariés qui nous rejoignent sur des postes en CDI dans nos métiers travaux.

La raison : nous avons connu une forte croissance de notre activité et de beaux succès commerciaux, de sorte que nos besoins en recrutement dans le domaine des travaux ont atteint un pic.

 

Avez-vous mis en place des dispositifs pour valoriser votre politique salariale ?

La valorisation des mesures prises dans le cadre de la politique salariale et de leurs bénéfices concrets pour les collaborateurs est très importante. Dans cette perspective, nous avons fourni à chacun de nos salariés un bilan social individuel (BSI) récapitulant l’ensemble des salaires et avantages sociaux versés par l’entreprise au cours de cette année. Cette démarche a été très appréciée par les collaborateurs, car souvent ces derniers ne réalisent pas tout ce dont ils bénéficient.

Par ailleurs, nous avons complètement revu notre accord de participation et d’intéressement. La participation étant généralement un sujet très flou pour les salariés, nous avons fixé une formule unique pour le calcul de la participation et de l’intéressement, ce qui nous permet de mieux communiquer.

 

Pour finir, quel est selon vous l’ingrédient secret à ajouter à l’addition C&B = RH + Finance+… ?

Ressources Humaines + Finance +… Communication !

Je pense en effet que la communication est essentielle lorsqu’on fait du Comp & Ben, et cela plus encore dans un contexte incertain et compliqué comme celui que nous connaissons en ce moment.

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